Daria, danseuse adulée, professeure adorée

Publié le par lpjs-nancy.over-blog.com

Professeure de danse classique au ballet de Lorraine, Daria Dadun vient tout juste d'obtenir le prestigieux Certificat d'Aptitude. Une reconnaissance pour cette ancienne professionnelle, qui transmet sa passion avec une immense générosité.

Ce grand studio rue Bazin, elle le connait bien. Elle y a évolué en tant que danseuse professionnelle sous la direction de Pierre Lacotte directeur du Ballet de Nancy. Daria est concentrée. Vêtu d'une jupe en mousseline noire ses gestes sont d'une extrême légèreté. Devenue aujourd'hui professeure émérite au CCN Ballet de Lorraine, elle parfait les moindres détails des exercices qu'elle proposera à ses jeunes danseuses. Une grande rigueur transparaît. Pas étonnant de la part de cette danseuse d'origine Polonaise. Admise à 8 ans dans la plus grande école Nationale à Gdansk, elle faisait partie de l'élite. « Les professeurs étaient très sévères. Ils venaient pour la plupart de l'Union Soviétique. J'aimais bien la discipline du corps et de l'esprit qui régnaient dans les cours de danse. Il fallait se surpasser. Il n'y avait pas de place pour les faibles. Je savais que l'effort fourni apporterai ses fruits … »

Entre Europe de l'est et Europe de l'ouest


Son adolescence, elle la passe loin de sa famille, restée dans sa ville natale à Bydgoszcz. « J'ai passé le concours avec succès au grand désespoir de mes parents ». Daria est consciente de sa chance. C'était le prix à payer pour donner des ailes à son rêve.
A cette époque, la Pologne était un pays fermé, où les pénuries alimentaires  et la répression minaient le quotidien. «  Mon internat se trouvait face au chantier naval de Lech Walesa, nous étions témoins directs des événements historiques qui s'y sont déroulés ». A 15 ans, un grave accident du genou lui fait prendre conscience que son corps à ses limites. Elle remporte l'année suivante le 1er prix du concours national de danse de Pologne et se produit sur scène. «  J'arrivais mieux à m'exprimer, ceci m'apportait une immense joie. Je me découvrais, comme si quelqu'un habitait en moi. »
A tout juste 18 ans, alors qu'elle guérit de l'anorexie, elle obtient son diplôme de danseuse professionnelle. Elle rencontre un autre danseur, son partenaire, son mari…


Fasciné par la grâce, la musicalité et la poésie du couple de danseurs, Maria Kryszkowska, directrice du Grand Théâtre de Varsovie les engage aussitôt. Daria devient soliste principale. Elle interprète les plus grands rôles du répertoire (Odette dans le Lac des Cygnes, Kitri dans Don Quichotte, Giselle …). Mais dans les années 80 la Pologne traverse une grave crise économique : « Il n'y avait plus aucune perspective de développement personnel. Nous devions louer un appartement dont la surface ne dépassait pas plus de 11 mètres carrés ». Avec son mari, la danseuse choisit de quitter la Pologne. Pierre Lacotte alors directeur du ballet de Nancy servira leur dessein. Ils viennent d'être engagés à Dortmund en Allemagne quand le chorégraphe qui monte « Giselle » recherche un danseur pour le rôle d'Albert. Mirek, le mari de Daria est le prince idéal. Le directeur nancéien engage le couple dans sa compagnie. « J'ai tout de suite aimé Nancy. La statue du roi Stanislas me permettait de me sentir en peu chez moi. » Daria devra faire ses preuves dans le corps de ballet à Nancy avant de devenir soliste en 1995. « Le travail ici m'a permis de rencontrer des chorégraphes plus contemporains ». Elle se produira auprès d'artistes de renommée internationale et partira en tournée dans le monde entier.

«  Pour moi c'était évident. La carrière ce n'était pas tout. »


Après 12 ans au plus haut niveau, les opérations du genou à répétition et ses deux grossesses, Daria décroche son diplôme d'état de professeur de danse : « Je voyais mes filles très rarement. Il fallait arrêter de danser pour pouvoir continuer à vivre normalement, sans antidouleurs. Et surtout ne pas perdre les plus beaux moments de la vie de mère. » Ces débuts en tant que professeur n'ont pas été simples : « J'ai toujours travaillé avec des professionnels, certaines choses me paraissaient évidentes. Ça ne l'étaient pas forcément pour mes élèves ». Elle découvre, néanmoins, le plaisir immense de transmettre sa passion et ses connaissances. Aujourd'hui chaque petit succès de ses élèves lui apporte une « grande satisfaction ».  La danse est un art total, et il aide au développement de l'individu. « En agissant sur le corps et les esprits, la précision s'impose. Il ne faut pas faire de bêtises. La responsabilité est énorme. » La patience combinée d'une extrême gentillesse la caractérise. Une pédagogue perfectionniste qui après deux années de formation à Lyon obtient son Certificat d'Aptitude.  « Je crois qu'aujourd'hui ce sont mes élèves qui m'ont appris le plus de choses. Ils m'accordent leur confiance. Je dois répondre au mieux à leurs attentes. »


A 41 ans, Daria Daudun enseigne aussi au conservatoire de Strasbourg. Son objectif est de communiquer la tradition du ballet classique. Mais aussi préserver au mieux le corps des élèves-danseurs. Elle espère former à son tour de jeunes professeurs. « Les aider à trouver leur propre chemin à travers mon expérience personnelle. »

Charlotte Overney

Publié dans Culture

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